lundi 18 décembre 2017

Le Transfert : À quoi ça sert ?

L'association Fersm organise une journée et demi de conférences et d'ateliers sur le thème du transfert, le 16 et 17 mars 2018. Voici le programme et le bulletin d'inscription :


 - Pour une meilleure lecture, vous pouvez télécharger les documents en faisant un clic droit -






lundi 15 mai 2017

5ème conférence du séminaire "À la limite..." : Force et sens dans le rapport au cadre d'une équipe soignante

 


Pour cette cinquième conférence du séminaire A la limite, Willy Falla nous propose une intervention ayant pour titre : "Force et sens dans le rapport au cadre d'une équipe soignante".
A travers son expérience de superviseur d'une équipe travaillant auprès d'adolescent et en prenant appuie notamment sur les apports de Bion et de Bleger, il vient nous expliquer la nécessité de la mise au travail des processus inconscients dans les équipes qui sont confrontées aux attaques régulières de leur cadre interne.

Willy Falla est psychologue, docteur en psychologie clinique, membre de la Société Française de
Psychothérapie Psychanalytique de Groupe, chargé de cours à l’université Paris Ouest Nanterre La Défense et à l’université Lumière Lyon 2 et président de Palissage.

mercredi 10 mai 2017




Troisième conférence du séminaire 2017 de l'association Fersm "A la limite".

Daniel Marcelli nous propose une intervention captivante sur le thème de l'autorité ayant pour titre : "La question de l'autorité aujourd'hui : comment conceptualiser celle-ci à la lumière des transformations sociétales ?"


dimanche 19 mars 2017


Seconde conférence du séminaire 2017 de l'association Fersm "A la limite".

La fin du patriarcat a-t-elle changé la structuration psychique du sujet contemporain ? Jean Pierre Lebrun revient, avec 20 ans de recul, sur son ouvrage majeur pour la psychanalyse francophone : "Un monde sans limite".


dimanche 22 janvier 2017


Pour débuter notre nouveau cycle de séminaire "Les Jeudis chez Georges" ayant pour titre "A la limite", nous avons eu le plaisir d'écouter Hervé Guillemain nous proposer une passionante analyse retraçant "une histoire sociale de la démence précoce et de la schizophrénie au XXe siècle". Une belle introduction à cette série de conférences qui vient nous rappeler les limites de la science et que tout diagnostic est aussi une construction sociale.

Hervé Guillemain est maître de conférences en histoire contemporaine à l’université du Maine (Le Mans) et membre du Centre de Recherche Historique de l’Ouest.
 

lundi 8 février 2016

La captivante intervention de Georges Gaillard : "L'institution et la fabrique du bien commun ?". Une très belle réflexion dans le cadre de nos journées du 4 et 5 décembre 2015 : La "folie" à l'époque qui est la nôtre entre contrainte et liberté.
Georges Gaillard propose une analyse de l'impact de l’hyper-modernité et de la "fin des grand récits" sur les fondements du lien social et l'équilibre du vivre ensemble. Il s'agit de prendre une position "méta" pour définir une matrice de sens de l’actualité du Malaise dans la culture.
 
Voici le texte de l'intervention de l’équipe de l’unité d’admission du pôle centre du Centre Hospitalier Spécialisé de Blain, présenté le 4 décembre 2015 lors des journées "La Folie", à l'époque qui est la nôtre, entre liberté et contraintes, organisées par Fersm.




« Ouverture d’un service »
Textes rédigés à partir d’un travail de l’ensemble de l’équipe de l’unité d’admission du pôle centre, en vue de la participation à un atelier lors des journées de formation organisées par l’association FERSM, les 4 et 5 décembre 2015.

Pour nous contacter :
pcadm@chblain.fr
02 40 51 51 20

Licences :
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Attribution 4.0 International.

1. Une brève esquisse de l’hôpital et du service avant son ouverture

Lecture par S. Le Quilliec et A. Tharot (Infirmières diplômées d’état)

La psychiatrie adulte « de secteur » sur le CHS de Blain est composée de 3 pôles correspondant à 3 secteurs et un pôle intersectoriel qui propose entre autre des activités d’ergothérapie et sociothérapie.
Nous travaillons dans l’unité d’admission du pôle “centre”. Chacun des 3 pôles dispose pour l’hospitalisation temps plein d’une unité d’admission et d’une unité intermédiaire, constituant ainsi 108 lits d’hospitalisation adulte.

Le CHS a été construit dans les années 60 sur le mode « hôpital – village » au sein duquel un lieu central de l’hôpital fut préservé au fil des années, d’ailleurs appelé « place du village ». Sur cette place on y retrouve notamment les différents ateliers d’ergothérapie, la cafétéria, la banque des hospitalisés, la laverie, la chapelle… Les infirmiers de la sociothérapie, outre le fait de proposer des activités thérapeutiques, gravitent autour de cette place, et assurent une présence autour de ces différents lieux de rencontre. D’ailleurs, leur bureau est situé au cœur de cette place.

L’unité d’admission accueille toute personne du secteur géographique concerné, quelle que soit l’expression d’une souffrance indiquant un état de crise dans le registre de la vie psychique et dont on estime qu’une période d’hospitalisation est nécessaire. Nous sommes amenés à recevoir ces patients à n’importe quel moment du jour ou de la nuit. Les modes d’hospitalisation sont ceux prévus par la loi : SL, SDT, SPI, SDTU, SDRE. L’unité accueille jusqu’à 21 patients, elle est dotée d’une chambre dite de soins intensifs. En plus des unités d’admission, chaque pôle comporte également une unité “intermédiaire” pour les patients qui nécessitent des soins, en hospitalisation, plus longs et autour duquel un projet de sortie est pensé par une équipe pluridisciplinaire. En pratique, les patients accueillis en unité intermédiaire sont dans un processus pathologique plus déficitaire, ce qui induit un temps d’hospitalisation plus long. La durée d’hospitalisation est aussi en lien avec des attentes de projets médicosociaux où les places se font rares. Ce phénomène n’est pas sans conséquence sur l’admission qui du coup n’accueille pas seulement les personnes strictement en état de crise aiguë, l’accompagnement se prolongeant pour mener à bien leur projet de sortie.

La circulation antérieure entre une unité de “crise” et le passage vers une unité de “resocialisation”, est remis en question selon deux facteurs :
  • le faible nombre de sorties de l’unité intermédiaire : il n’y a pas régulièrement de lit disponibles au sein de ce service ;
  • la prise en compte des mouvements transférentiels spécifiques entre patients et soignants, quirend délicat le changement brutal d’unité d’hospitalisation et donc de soignants pour un patient donné.
Or des pressions importantes sont ressenties pour ne pas laisser de lit inoccupé malgré le temps incompressible qui parait nécessaire pour travailler cette séparation avec le patient. Dans la pratique, on observe que certains patients, hospitalisés durant des mois, voir des années en admission demeurent parfois assez instables sur le plan psychique, en dépit des soins reçus. Ces quelques patients restent donc hospitalisés en admission malgré la chronicité de leurs troubles car nous craignons, d’autant plus pour eux, un bouleversement trop brutal de leur vie psychique déjà peu stabilisée.

L’équipe pluridisciplinaire qui travaille à l’admission est composée d’infirmiers, médecins psychiatres et généraliste, cadre de santé, ASH, assistante sociale, psychologue, secrétaire, et d’autres professionnels de l’hôpital gravitent autour de son activité principale, (kiné, ergothérapeutes…). Les infirmiers, groupe d’appartenance le plus “majoritaire” de l’équipe pluridisciplinaire, sont au nombre de trois le matin, quatre l’aprèsmidi, un infirmier en + la journée (8h15 à 16h) et deux infirmiers la nuit. Cette présence infirmière donne un statut particulier à ce groupe pour une évaluation/observation du quotidien de la vie de l’unité. Celui-ci est ponctué par des moments collectifs et individuels avec les patients autour des repas, goûter ou tisane du soir, soins d’hygiène, les accompagnements variés comme : « la laverie (lieu de rencontre autour de la notion d’autonomie)"les sortie dans le parc (moment privilégié pour des entretiens informels, les visites à domicile »…, la distribution des traitements (infirmiers et patients), et des temps entre professionnels comme les transmissions d’équipe et les réunions cliniques.

Le 02 juin 2014 nous avons acté la décision d’ouvrir le service durant la journée. Cette décision a nécessité en amont un travail de réflexion et de préparation. Aujourd’hui, nous voulons témoigner de cette expérience et des effets qui en ont découlé… Dans un premier temps nous allons vous exposer les raisons qui nous ont amené à ouvrir les portes et le déroulement de sa mise en place. Dans un second temps, certains développeront sur leurs ressentis sur leurs cheminements pour rendre l’ouverture de la porte, possible pour eux. Un troisième temps sera consacré aux dispositifs de soins mis en place autour de l’ouverture des portes. Puis, les infirmiers présents aujourd’hui tenteront de rendre compte et de témoigner autour de la dynamique d’équipe et des bouleversements que l’ouverture des portes a engendré au sein de celle-ci.

2. Cheminement de l’équipe avant l’ouverture : une graine de camélia qui
pousse…

lecture par S. Le Lay, IDE

Auparavant, la porte d’entrée du service est fermée à clef. Les patients qui souhaitent sortir de l’unité doivent donc solliciter un membre de l’équipe soignante pour pouvoir franchir la porte. Les autorisations de sorties (seul, accompagné, pas de sortie), de téléphone, de visite sont individuellement prescrites, par le psychiatre. Par ailleurs de nombreuses choses ne sont pas autorisées dans les chambres comme, la nourriture, rasoir, parfum, téléphone portable, chargeur, ordinateur, jeux… Les raisons sont nombreuses :besoin de coupure avec l’extérieur, limiter les conduites de remplissage, risque de tentative de suicide, de mise en danger… Parfois même on en a oublié la raison de telle ou telle restriction. Nous sommes sur un modèle de fonctionnement où « tout est interdit sauf exception », l’exception (autorisation) étant définie au moment de la rencontre avec le médecin référant, et selon le « contrat » établi avec lui. D’où c’est parti ?

Une idée a été formulée par le médecin chef de pôle de l’époque comme un souhait pouvant devenir un projet, le projet d’une unité d’admission dont la porte serait ouverte. Cette idée a été soutenue d’emblée par le 2e médecin de l’unité David Reyboz, en lien direct avec son travail de thèse. Elle a été présentée à l’appréciation des membres de l’équipe. Cette idée, qu’elle soit nourrie par des valeurs humanistes qui soulève des questions d’éthique, de liberté individuelle, ou des exemples issus des courants de la Psychothérapie institutionnelle, a fait son chemin…

Des discussions ont démarré pendant les réunions institutionnelles, chacun est appelé à son positionnement subjectif pour envisager cette idée, y réfléchir ensemble, se laisser traverser par les questions des uns et des autres pour pouvoir y adosser un positionnement propre. Une des raisons ayant conduit à penser l’ouverture des portes a été l’idée « d’un accueil de qualité », « un accueil bienveillant » pour des patients souvent en grande souffrance. Les restrictions appliquées jusqu’alors collectivement dans une logique de protection, nous paraissaient de moins en moins pertinentes dans la prise en compte de la singularité de chaque situation. Dès lors il nous a semblé plus cohérent de définir des règles avec chaque patient, en fonction de sa situation ; Ainsi ces restrictions tiendraient compte de la relation à ce moment là, entre patients et soignants. Il peut s’agir, par exemple, de la nécessité d’une rupture avec l’entourage, du temps nécessaire pour connaître un patient, du risque suicidaire dans certaines situations, du risque d’hypersollicitation de l’entourage pour un patient en décompensation maniaque...

Des questions se sont posées et ont été débattues. Entre incrédulité, scepticisme et enthousiasme on a engagé des discussions chaque semaine, sur différents sujets qui nous préoccupaient à l’époque :
  • risque de suicide, de fugue
  • on évoque les « conduites d’évitement », ce qui pour les patients se mettrait au service
  • de leur résistance face au soin, et qui les conduiraient à fuir.l’introduction de toxiques illicites, d’alcool, l’intrusion de personnes extérieures, dans ce lieu vécu comme protégé…
  • de l’intérêt de circuler librement, et des effets que cela aurait…
  • des questions autour de la responsabilité ? La question médicolégale pour les patients en soin sous contrainte ?
  • d’autres questions comme « pourquoi maintenant" ? (sous entendu : baisse des effectifs et des moyens à long terme)
  • échange autour des notions de “cadre” et de contenance…
  • la peur d’un manque de temps d’observation et de rencontre.
  • la question des patients mineurs (assez fréquent) et la question de la responsabilité
  • médicale.
  • la crainte de plus de dispersion, de pertes d’informations importantes voire vitales pour
  • le soin dans sa continuité (observance d’un traitement ???)
  • globalement la peur que ce qui fait matière à soigner dans de bonnes conditions puisse échapper…

Ces projections dessinent la crainte de la fuite, de ce qui vient à échapper, quelque chose qui plus tard a pu être nommé par certains comme un manque de maîtrise. Paradoxalement nous étions aussi convaincus qu’il était intéressant de travailler en unité ouverte, d’encourager le patient à être acteur de son propre soin, de lutter contre l’infantilisation (souvent ressentie lorsque les patients arrivent à l’hôpital psychiatrique)… De favoriser la responsabilité de chacun, de travailler autour de la confiance, de l’alliance thérapeutique. Il s’agissait aussi de répondre à la loi et au droit pour chaque patient d’ « aller et venir ». Et nous étions face à un paradoxe, en tant que soignant : la préoccupation autour des patients (avec leurs droits) face à des politiques de plus en plus sécuritaires et des exigences sociétales prônant l’enfermement de la folie en prévention de tout risque de passage à l’acte hétéro agressif. En avril 2014 une visite d’équipe a eu lieu à La RochesurYon, au CH G. Mazurelles pour rencontrer une équipe soignante travaillant dans une unité d’admission ouverte, depuis de nombreuses années. Des membres de l’équipe se sont réunis et ont travaillé à une élaboration des questions soulevées dans la perspective de cette pratique, questions à exposer, réponses à entendre, recueillir, transmettre et débattre au retour.

Au retour l’ouverture des portes était évidente pour certains soignants présents à Mazurelles, mais pas forcément pour d’autres. Malgré de nombreux débats et appréhensions encore présents au sein de l’équipe, en Juin 2014 nous actons la décision de maintenir la porte de l’unité ouverte (fermée mais pas verrouillée), entre 9h30 et 18h30, du lundi au dimanche. L’ouverture de la porte de l’unité s’accompagne du passage du « tout est interdit sauf exception » à un autre fonctionnement, où « tout est autorisé sauf exception ». Ce qui était donc “interdit” d’emblée à l’admission (notamment les téléphones portables) ne l’est plus, sauf si l’état clinique du patient ne le permet pas mais cela est d’abord soumis à une évaluation régulière de l’équipe. On considère dorénavant que ce qui fait exception fournit possiblement la matière pour travailler la singularité de chaque situation, malgré une complexification de la rencontre soignante, celle-ci prenant moins appui sur la demande de sortir ou rentrer.

Une charte de soins de l’unité est alors rédigée et affichée dans les chambres par la suite. (Le début du collectif s’est esquissé ici autour de l’idée de) Nous souhaitions construire un projet qui cherche d’abord à proposer un accueil bienveillant pour celui ou celle qui arrive alors que son monde est en ruines. Une question était sous-jacente : cette porte que l’on connaissait fermée depuis des années, est-ce que l’ouvrir ça va de soi ? Dans quelle représentation maintenait-elle l’idée du soin, ce que l’on appelle notre « conception du soin » et qu’est-ce que ce changement allait venir révéler dans l’après-coup ? Dans notre réflexion la liberté est apparue comme étant mis en arrière plan au nom du soin, alors dans cette optique (où) liberté et soin venaient à s’opposer, une autre question est apparue : la porte fermée maintenait-elle une confusion entre contention et contenance ? Et alors, qu’est-ce
que nous, membres de l’équipe faisons collectivement de cette liberté, entre interprétation des règles de l’établissement et institution de nos règles propres. Le désir autour duquel peut se nouer la relation entre soignants et patients a été signifié à travers cet acte fondateur de la reconnaissance d’une parole vivante. Parole vivante en ce sens qu’elle circule, prenant appui sur ceux qui la porte(ent), s’exposant aux remaniements constants dues aux clivages, à la division, au déni ou au refoulement. Vivante si elle est pétrie / modelée des questions qui se cherchent (se formulent) dans l’équipe, et qui résiste aux
protocoles qui figent l’action de ses acteurs.

3. Développements plus singuliers :

D. Reyboz, psychiatre

D’où ça m’est venu, cet intérêt pour les serrures et leur ouverture ? Comment cela à-t-il put aboutir à des effets bien réels, concrets, dans cette unité là du pôle centre à Blain ? Mon travail de thèse visait à préciser les tenants et aboutissants qui conduisent à ouvrir oufermer à clef une unité de soin. Cette démarche provient tout d’abord, consciemment, d’un sentiment d’incohérence : pourquoi existe-t-il
des services fermés à clef dans certains CHS et pas dans d’autres, alors qu’ils sont censés avoir les mêmes missions et recevoir un public relativement semblable, en tant qu’appartenant au “secteur” de psychiatrie adulte ?

Le dispositif de formation des psychiatres, l’internat, durant lequel on enchaîne plusieurs stages de 6 mois dans différents services de psychiatrie, permet d’apprécier la diversité des pratiques, et de la questionner. Questionnement très logique, dépassionné, dont on peut se demander pourquoi il n’est pas plus soulevé que ça, vu les implications sur le respect des droits individuels fondamentaux. Alors pourquoi moi, j’ai travaillé là-dessus ?

Si je tiens à développer ce point, c’est que cela souligne, je trouve, que derrière l’apparence de (simples) problématiques de gestion de droits/ risques, il y a bien « autre chose » qui touche à une vision/conception non seulement de ce qui peut soigner les problèmes psychiatriques, mais aussi beaucoup plus largement de ce qui m’apparaît bon dans l’organisation des rapports humains. “bon” simplement au sens « ne générant pas de souffrance de façon évidente » ; Primum non nocere.

Je constate à posteriori que cet « autre chose » rend compte de vues politiques qui me sont intimes, dont je ne soupçonnais pas à l’époque qu’elles allaient se manifester plus tard, après l’ouverture effective du service, à d’autres niveaux que celui de la gestion de la serrure. De plus, je pense que c’est précisément c’est cela qui met en mouvement, qui donne l’énergie nécessaire au travail à mettre en oeuvre. De ce que j’en perçois actuellement, il s’agit d’un sentiment de peur. Peur “viscérale”, qui
mérite certainement des élaborations complémentaires de ma part, mais cela me regarde. Peur du contrôle de l’un par l’autre ou des uns par les autres, et donc aux enjeux de pouvoirs entre individus ou groupes. Un des ouvrages qui m’a pour l’instant le plus éclairé sur cette question dans l’histoire de la psychiatrie est le livre de Gladys Swain et Marcel Gauchet, Pratique de l’esprit humain (1980). Il y est question du projet asilaire, et de sa tentative de « prise en masse » des esprits d’une population de malades par des méthodes principalement de contrôle strict de l’environnement dans lequel évoluent les corps. Projet totalitaire s’il en est, à l’origine de la psychiatrie. La hiérarchie des pouvoirs y est en effet mise en place à un niveau extrême, un rapport de domination total est établi : un petit ensemble d’individus contrôle tous les paramètres « de vie » d’un autre ensemble d’individus en souffrance, pour leur bien. Cuisant échec, qui s’est soldé le plus souvent par la mort. Cela me fait peur.

Pourtant, en psychiatrie, on a bien à faire à des sujets pas tout à fait bien “établis”, ou suffisamment “constants”, voire qui semblent avoir disparus, qui paraissent inaccessibles à la relation, et cette « altération du discernement » justifie, en tout cas sur le plan légal, de « prendre le contrôle » d’une partie de l’individu. (via son corps : choix du lieu où il peut séjourner, limitation de ses déplacements, introduction de produits psychotropes…) Qu’en est il sur le plan éthique ? Cela justifie-t-il de pouvoir entrer dans un rapport de domination ? Un rapport de domination peut-il participer à l’émancipation du Sujet ? Pour moi, et de façon pour l’instant peu élaboré, les rapports de domination « de masse », qui visent un groupe hétérogène, me paraissent aliénants, en tout cas participant davantage à l’aliénation du sujet. Je précise qu’il s’agit de ce type de rapport spécifiquement « de masse" : je pense et j’ai constaté cliniquement qu’un rapport de domination, de contrainte partielle et individualisée peut contribuer à ce que le Sujet se retrouve. (Exemple dans les états maniaques) J’insiste sur cette émotion, que j’oppose au « constat factuel raisonnable » (du non-respect des droits par exemple), car il me semble que le simple constat de faits, aussi scandaleux soient il, ne pousse pas au mouvement, au travail, au changement. Il faut autre chose, du côté des affects, parfois irrationnels, à l’origine confuse et intime, qui se mêle à la raison. (Lordon, 2010).

Initialement, cet affect m’a poussé au questionnement d’un paramètre environnemental : verrouiller ou non la porte. En précisant davantage ce sur quoi porte cet affect, les rapports de domination, on peut bien se douter que cela ne va pas s’arrêter là. Et en effet, c’est ce que je constate, dans l’extension de mon travail : après les paramètres environnementaux (mille “détails” du cadre hospitalier peuvent être questionnés sous cet angle), c’est plus directement le rapport à la parole du patient dans l’établissement qui devient problématique, et ne pas proposer un dispositif qui permette que cette parole devienne quelque chose me devient insupportable. D’où un intérêt vif pour des outils tels la réunion soignants-soignés, les « clubs thérapeutiques » qui me semblent, de loin (je n’en ai aucune expérience), des dispositifs permettant de se saisir des mouvements qui proviennent des patients.

A un autre niveau, ces rapports de dominations sont présents dans l’organisation même de l’hôpital (sans les patients), dans la hiérarchisation du travail et son cloisonnement, ce qui me met parfois en conflit avec l’administration. N’est il pas aliénant que le médecin ne fasse que prescrire, les infirmiers qu’effectuer, les cadres que cadrer ? Cela n’a-t-il aucun effet sur les patients ? Je ne cacherais pas que cela s’étend encore davantage, à l’organisation de notre société néolibérale et ses conséquences sur le citoyen, mais cela n’est pas le propos ici. Pour moi, le moteur qui m’a poussé à l’ouverture des portes n’est donc pas qu’une analyse rationnelle des paramètres logiques s’y rapportant. Derrière, il y a une tentative de résistance aux systèmes/structures de domination de masse, que je considère comme une forme de processus d’aliénation très étendue et puissante. Au sein de l’institution psychiatrique, je me rends compte que, pour éviter d’y être soumis et d’y soumettre les patients, une analyse critique de l’organisation des dispositifs et de nos rapports sociaux à tous les niveaux est nécessaire. Pourquoi vous en faire part ?

Pour lutter contre la croyance que c’est la « raison froide » qui peut gouverner et mettre en mouvement. Croyance qui se réalise, je pense, quand on s’en remet uniquement à des statistiques quantitatives pour penser ce qui arrive aux autres, quand on met en oeuvre des dispositifs génériques d’évaluation de la qualité, des risques, des pratiques, dispositifs étrangers à notre travail quotidien et que l’on doit appliquer au titre du « new public management », quand les individus au travail deviennent de la ressource humaine interchangeable… C’est ce qu’a également évoqué C. Guibet Lafaye dans son intervention ce matin il me semble, concernant l’illusion d’un Sujet strictement rationnel. Cela participe à la résistance à un système de pensées certain que la science peut tout à fait
appréhender la réalité, « épistémologie réaliste » décrite et dénoncée par le philosophe P. Jensen dans un article récent du Monde Diplomatique. Je découvre seulement maintenant qu’un ensemble de pensées et d’outils ont déjà été élaborés et expérimentés dans ce sens, au sein du courant de psychothérapie institutionnel, qui m’étaient inconnus avant mon arrivée au pôle centre.

4. D’où c’est parti ? Voici mon témoignage, mon ressenti à postériori :

A. THAROT, IDE

Je suis parti d’une phrase lancée par David Reyboz, dans le bureau infirmier (« Ah, cette sonnette ! Peut-être que si la porte de l’unité restait ouverte on l’entendrait beaucoup moins !"). Cette idée me paraissait impossible, impensable car folle. De manière défensive, elle m’a fait sourire lorsque je l’ai entendue car je ne pouvais pas faire offense à cette parole en m’y opposant fermement, pour autant elle me dérangeait. Que faire de cette parole qu’il dépose, qu’il vient faire circuler dans le bureau ? Comment mes collègues vont réagir à ce « pavé dans la mare » ? Que veut-il de nous, que veut-il de moi ce jeune psychiatre ?

Et voilà que j’apprends quelques jours plus tard que le chef de service aurait cette même idée. Il a fallu que je me fasse ma propre opinion, en allant vérifier l’existence d’une telle “machination”. Je suis allée sur internet chercher des garanties, des témoignages que si cette idée existe ailleurs, alors elle doit être un minimum concordante à mes convictions professionnelles. Je ressentais le besoin presque irrépressible d’aller voir ce qui se faisait sur le territoire national, du moins sortir de ce que j’ai pu connaître sur le département par le biais de mes stages et ma courte expérience professionnelle. Ce que j’ai pu trouver m’a plutôt rassuré, les écrits et témoignages que j’ai pu lire sont venus confronter mes croyances thérapeutiques à une multitude d’autres chemins possibles. Et je dois bien le dire, j’ai plutôt aimé cela.

Pour autant, cette idée d’ouverture de porte venait ébranler une position, un rôle que je prenais volontiers à l’époque que je prends sûrement encore, celui d’une « mère protectrice ». Comment vais-je pouvoir protéger des personnes, dont je suis/me crois responsable, si la limite physique qui me permettait de les avoir à l’oeil est ouverte ? Si les portes des unités d’Admission sont restées fermées aussi longtemps, c’est bien qu’il faille les protéger de l’extérieur. Le fait qu’un patient psychotique soit enfermé dans une unité doit bien avoir un sens, une contenance. 

Une idée m’était véhiculée, que les limites passives des murs et des portes fermées induisent un bouillonnement pulsionnel plutôt vivant mais s’éparpillant, que les soignants tentent d’agglutiner entre eux pour réunifier un Sujet en ruines et entrevoir une ébauche de relation possible. Du moins c’est ce que j’en ai compris pendant mes études et mes stages. J’ai pris ceci comme une vérité à appliquer, que je ne permettais pas de remettre en question car inculquée par mes pairs bien plus expérimentés que moi et finalement assez rassurante en tant que jeune IDE. La confrontation entre cette pratique et mes nouvelles lectures m’est saisissante. Après plusieurs discutions avec mes collègues, un semblant de questions émergent pour moi, une déconstruction de mes croyances s’opère : est-il pertinent d’installer des conditions où une “crise”, un feu à éteindre, entendue ici comme « bouillonnement pulsionnel », pourrait se rejouer avec les pompiers/soignants à disposition ? N’y a-t-il
donc pas une contenance qui puisse exister avec des limites qui me paraissent moins franches ? Des limites qui se prolongent ? Cette limite passive d’une porte fermée, demeure poreuse car soumise à la subjectivité de l’autre et donc dépendante de lui. Est-ce que je veux que le patient soit dépendant de moi, car c’est bien moi qui ai la clé et qui déciderai sur le moment si je le juge en capacité de sortir ou non ? Est-ce que je représente pour lui une simple portière ? Un rôle que l’on me donne, dont je tente de résister moi-même en essayant de mettre les formes d’un discours thérapeutique bienveillant. Tout cela en sachant que j’ai toujours en main le moyen de garder cette personne auprès de moi. Cette dépendance à l’autre n’induit-elle pas une résistance majeure, insurmontable ou fort épuisante, mettant à distance une rencontre subjective possible ? Avec la porte ouverte : Que vais-je devoir inventer avec le patient pour ne pas qu’il m’échappe ou pour qu’il vienne s’adosser à ma vision de la situation et tenter de contenir ce qui lui échappe ? Inventer une manière d’être avec lui pour qu’il puisse jouer/rejouer sa scène interne… et qu’on puisse tenter de la faire nôtre… La contenance psychique soignante nécessaire dans une rencontre, n’est-elle pas essentiellement celle que l’on incarne le plus, celle qui parle le plus de notre singularité et non celle d’un rôle à prendre ?

Voila peut-être un point essentiel du déplacement qui s’est opéré pour moi. Confronter ma singularité : ce que je vis, ce que je vois, ce que j’incarne pour une même situation avec celle du patient. À partir de cette confrontation, trouver un chemin commun, en tout cas celui qui parait le plus sécurisant pour chacun de nous, tout en ayant en tête, la possibilité que le patient puisse choisir d’aller ailleurs.

S. Le Quilliec, IDE

En ce qui me concerne, l’idée de l’ouverture des portes ne m’a pas d’emblée semblé folle, j’avais déjà eu l’occasion de travailler dans une unité ouverte bien que son fonctionnement, et je m’en rends compte aujourd’hui, était très particulier car concernait les patients hospitalisés « pour la première fois » et donc sans antécédents psychiatriques, d’hospitalisation, en tout cas. Je ne connais pas les raisons qui expliquent pourquoi ce service fonctionne de cette façon, différemment donc des autres unités d’admissions, de ce même établissement, elles, fermées… comme si ces patients pouvaient encore échapper et être préservés de l’institution, comme si quelque part on les protégeait d’une certaine vision du soin en psychiatrie…

Les autres unités que j’ai pu connaître, fonctionnant toutes avec un certain nombre de règles, certains interdits et j’ai longtemps eu l’impression que ça fonctionnait partout de la même façon, et que cela avait certainement du sens. Je pensais que cela permettrait d’offrir un cadre de soin sécurisant, protecteur, favorisant la réhabilitation sociale. Alors certes, pourquoi pas ? Il y a du sens à ça, certainement ; Mais au-delà de ça, je trouvais que nous limitions le soin, qu’il était biaisé par tous ces interdits et ces « règles institutionnelles ». Alors où se trouve le juste milieu ? Mais avons nous le droit de faire ça ? Avons nous le droit d’interdire à un patient l’usage de son téléphone portable, par exemple ? Avons nous le droit de lui interdire de grignoter le soir dans sa chambre ? Plus largement, avons nous le droit de porter atteinte à sa liberté d’aller et venir ?

Alors, dans certaines situations, cela pourrait pourtant sembler judicieux, on donne souvent l’exemple du patient en décompensation maniaque et pour lequel il est sûrement nécessaire, sur un temps donné, de le limiter, parce que son état clinique le nécessite. Là où cela est dangereux, c’est lorsque ce fonctionnement se systématise à l’ensemble des patients d’une même unité et plus largement d’un même établissement. Pourquoi faire ça ? Quel sens ça a ? D’un point de vue éthique, est-ce acceptable ? Pourrions-nous faire autrement ? C’est peut être à ce moment là que les choses ont changés pour moi. Je me suis mise à penser, soutenue par d’autres professionnels, que nous pourrions faire autrement… que l’enjeu central n’était pas de venir “remodeler” le patient à ce que nous attendions de lui, et plus largement à ce que la société attendait de lui mais plutôt d’aller à la rencontre de l’être humain souffrant d’une pathologie psychiatrique, et de composer avec celle-ci. Lorsque je dis tout ça, je pense beaucoup aux patients psychotiques parce que c’est ce qui moi me touche le plus. Mais ce n’est pas le sujet…Et puis qu’est-ce qu’ils en comprennent de nos règles ? Perçoivent-ils le sens de ces interdits ? Peuvent-ils seulement se représenter de quoi il s’agit ? Je ne suis pas vraiment sur… et donc, dès lors, mon challenge fut d’aller à la rencontre du psychotique, de la façon la plus simple et la plus sincère possible, avec ce que je suis, ce que je pense, ce qui me touche et ce qui ne me touche pas, moi en tant que personne qui rencontre une autre personne !

Il est évident que des rencontres professionnelles, enrichissantes, ont amenés à ces questionnements et à cette remise en question. L’ouverture des portes allait donc dans cette logique bien que cette idée me faisait aussi très peur, en tout cas au début ; J’avais des craintes, celles partagées par beaucoup… Le travail de réflexion mené m’a permis de lever ses craintes et d’avoir souhaité ensuite sauter le pas. Aujourd’hui mon travail s’inscrit toujours dans la continuité de cette démarche, de la façon la plus authentique qu’elle soit, dans mon rapport à l’autre. Je comprends aussi aujourd’hui que l’infirmier ne peut pas faire à la place de l’autre, ne peut pas penser pour lui, mais plutôt tenter de nouer quelque chose avec le patient, et de penser le soin avec lui, de le rendre acteur de ce qui se passe pour lui, dans le soin. Tout cela nécessite de s’autoriser soi à rencontrer cet autre… Cet autre en souffrance. Plus largement, cela nécessite aussi de donner du sens à la parole du patient, de la rendre vivante,
de la faire exister, et de la faire circuler, ce que nous tentons de faire à travers certains
dispositifs de soins.

5. Dispositif autour de l' « ouverture de la porte », la circulation.

A. Ferenczy, psychologue

Ce dont je voudrais parler dans ce témoignage est le lien entre le dispositif autour de la porte ouverte » et ses effets sur la question du soin, notamment à travers l’idée de circulation…(le dispositif étant l’ensemble de règles que nous avons travaillé ensemble et convenu de tenir et d’articuler entre elles) L’élaboration de ce projet s’est beaucoup appuyé sur les discussions des espaces de paroles, entre soignants (réunions institutionnelles et réunions cliniques) et entre patients et soignants (réunions soignants-soignés). Ces espaces ont permis que la parole circule, que les idées fassent leur chemin au fur et mesure qu’elles apparaissent et sont travaillées, qu’elles se modifient et prennent une forme qui peut se laisser agir. Ici se sont croisées les questions des soignants et des patients, leurs craintes et affects à élaborer, leur critiques, propositions et projets, avec leur part d’utopie. Quelques questionnements ont insisté et ont dû se travailler : et notamment autour de nos habitudes de travail, « qu’est-ce qui va retenir les gens dans l’unité si la porte est ouverte, quelle forme le contact au quotidien va-t-il prendre si les patients n’ont plus à demander l’ouverture de la porte ? Autour du souci d’une protection des patients, des craintes se sont exprimés : les patients vont-ils fuir ? Et le risque de l’acte suicidaire ? Vont-ils ramener des toxiques dans l’unité ? Qui va rentrer qui n’a pas sa place ici ?

Ces questions nous ont amenés à parler entre les lignes de comment ce lieu est vécu, par nous, soignants, et par les patients, à travers ce qu’ils nous renvoient. L’ouverture de la porte allait de pair avec l’idée d’un déplacement, de la circulation, circulation des personnes, mais aussi des objets (argent, cigarettes, café, etc) et surtout de la parole. Elle s’est imposée avec des interrogations autour de l’expérience du déplacement, du mouvement du corps pris dans un trajet, et pouvant faire émerger de la pensée. 

Je pense à Mme M, figée et mutique depuis des mois, ne pouvant sortir de son inertie qui ne lui permettait guère de se déplacer en dehors de l’unité, ou alors seulement en compagnie d’autres patients.. Les entretiens, soins ou autres sollicitations ne semblent la toucher que très peu. Elle accepte cependant la proposition de l’accompagner dehors, à la cafétéria, s’asseoir avec elle le temps d’un café, une ou deux cigarettes, et quelques mots. En quelques semaines, quelque chose s’anime qui lui permet d’accepter d’autres propositions, comme d’aller faire un gâteau à la maison communautaire, et plus tard y entrer pour quelques mois et arriver à reprendre le fil de sa vie.

Cette idée émerge lors de réunion d’équipe où la question se pose, sans réponses, de ce qui se passe pour elle ? Son “éveil” semble en lien avec ce que dans l’équipe nous mettons en oeuvre pour bouger, pour créer du mouvement dans nos idées et nos circuits de soin. Et ça crée la possibilité de commencer à se parler. La réflexion s’est (ensuite) orientée sur l’institution d’espaces qui peuvent soigner dans l’unité, au-delà des entretiens individuels et des soins du corps, plutôt pensés dans un registre duel. Des questionnements sur les effets d’une circulation libre commencent alors à se poser pour ce qui concerne chaque personne d’une part, et pour le groupe d’autre part. Alors d’autres questions émergent : Est-ce que des moments collectifs peuvent être soignants ? les moments de la vie quotidienne peuvent ils en faire partie ? Dans ces espaces collectifs qu’est-ce qui différencie nos places de soignants ? Qu’est-ce qui vient différencier un espace d’un autre ? Lorsque le 2 juin 2014 la porte s’ouvre, nous continuons à y travailler à partir des effets que nous observons…

Dans le mouvement engagé une élaboration collective cherche à prendre forme, et certains d’entre nous y voyons le déplacement vers une position subjective différente des soignants, moins basée sur la demande du patient mais prenant plus appui sur sa question sous-jacente, sur ce qui dans sa demande serait à décoder, et qui engage autrement le soignant. Puis, ce dispositif s’est enrichi avec la mise en place de plusieurs espaces collectifs, d’accompagnements individuels plus spontanés, marqués par le transfert, inscrits dans une répétition ou pas, ponctuant le temps ou prenant place dans les espaces interstitiels. Ainsi se sont montés l’atelier pâtisserie, un atelier jardin, les sorties en petit groupe pour prendre le repas au self du CHS, l’atelier bien-être. Dans un lien plus distendu à l’équipe, nous sommes restés attentifs aux espaces d’ergo et de sociothérapie et aux projets qu’ils proposent, et nous sommes greffés sur des projets ponctuels à l’occasion par exemple de la SISM ou le vide-grenier de l’année.

Nous avons supposé que la porte ouverte permet une circulation à condition que les personnes qui rentrent et sortent la vivent comme un passage, d’un lieu à un autre, lieux teintés par des ambiances différentes, permettant comme le dit Jean Oury une sorte de table de distinctivités. Des remarques et critiques ont émergés en RSS, et aussi certaines idées et propositions : par exemple que le petit déjeuner a lieu trop tard dans la matinée, il a été demandé de le décaler une demi-heure plus tôt, de servir le beurre par table quand il est très demandé, pour une plus grande équité. (…) Ces idées ont à leur tour été discutées dans les réunions institutionnelles, débattues, parfois vivement, avant de faire retour avec les patients en cherchant une forme qui tienne collectivement pour donner suite aux suggestions, ou en expliquant les motifs de refus issus du débat entre soignants.

Petit à petit quelque chose a pris forme à travers ces réunions, quelque chose qui touche à l’ambiance du lieu et à son impact sur chacun. Ces espaces sont une invitation à parler et à penser le lieu collectif avec la possibilité d’un réel impact de son passage lors d’un séjour : une règle du quotidien qui a changé, une recette de gâteau qui a marqué les esprits et à laquelle on revient plus tard, un dessin que les infirmiers ont accroché au mur de leur bureau, une jardinière construite pour le jardin et où poussent des herbes que parfois on boit en tisane. La circulation de la parole a été pensée comme allant de pair avec l’ouverture de la porte : elle permet que ça parle et dans son flot d’idées elle porte, là où on ne s’y attend pas forcément, celui ou celle qui s’y accroche pour essayer d’en construire une pensée. Tel Mr H, qui semble sortir peu à peu d’un état d’hébétude, en s’appuyant sur l’idée qu’il construirait des jardinières pour la cour de l’unité à l’atelier où il se rend toutes les semaines. Ce projet a pris naissance à la réunion de l’unité, où il est venu prendre une place parmi les autres en proposant ses idées, par exemple faire des crêpes, ou alors proposer ses écrits pour le futur journal de l’unité. Il s’est agi de l’accompagner à s’insérer dans le tissu complexe de liens qui ont rendu ce projet réalisable, et sans qu’il s’y retrouve tout seul, ou nulle part, comme il semble l’être dans ses allers-retours incessants, entre le mur et le claustrât de la cour de l’unité. Circulation donc, pour permettre des passages, d’un lieu à un autre, d’un projet à un autre, d’une idée à une autre, espérant créer le lieu propice à faire émerger un mouvement psychique…

La notion de contenance s’est révélée différente de ce que la porte fermée a pu supposer, elle s’est imposée dans cette expérience avec des questions autour de ce qui permet aux gens de rester dès lors qu’ils peuvent partir… En effet, pour celui qui erre toute la journée dans un nuage de fumée, des moments collectifs institués permettent un moment de répit et de repos, une scansion du temps, de son temps à lui. Elle a posé aussi la question de ce lieu tel qu’on le vit, consciemment et à notre insu, comme endroit à préserver ou à exposer à ce qui vient du dehors. La porte, interface entre dedans et dehors, est apparue comme le prisme qui vient révéler nos rapports personnels à chacun autour, entre autres, de l’intime et du partageable. La réflexion continue sur les différences des espaces à proposer, vise à créer les nuances qui colorent diversement les moments de la journée et de la semaine, dans l’unité, et dans ses liens avec les lieux à proximité ou ceux plus éloignées.

Des expressions et quelques concepts jalonnent les discussions où tentent de se théoriser nos questions et débats : « Mettre du sens » à une PEC, c’est quelque chose qu’on entend souvent parmi les soignants, qui cherchent la bonne direction à prendre avec ce patient, et demandant aussi qu’on « aille tous dans le même sens » pour éviter d’être dans l’incohérence, la confusion ou le paradoxe. Alors quelle peut être la direction qui guide une équipe entière et quel lien y a-t-il à voir avec
l’idée de la circulation ? Lorsqu’on circule, on doit choisir un sens, certes, mais il en va autrement pour le sujet de l’inconscient. Si le transfert se fait guide, c’est du désir de chacun qu’il s’agit, cela peut fournir de multiples directions. (comme le disait Oury en citant Antonio Machado, « le chemin se fait en marchant ») Il semble qu’un des recours de l’équipe à cette question du sens, une des solutions qu’elle a cherchées comme guide, a été une certaine forme de débat, au fil des mois, sur des questions « de fond », le sens du soin, qu’est-ce qu’être soignant selon la place, le rôle, la fonction de
chacun ? Il s’agit de questions qui s’ouvrent et se referment, mais essaient de maintenir une parole vivante, et que les décisions qui en découlent ne se sclérosent pas sous le poids d’un supposé savoir, ni ne se laissent guider par les affects peu élaborés lorsque des transferts massifs attaquent la relation.
Pourquoi dans l’équipe subsiste l’impression, qui s’exprime ces derniers temps, que le soin collectif se fait au détriment d’un soin individuel ? 

L’équipe témoigne d’une division en son sein, des discours se font entendre en réunion, d’autres à travers l’ambiance de l’unité, malgré une certaine continuité dans les échanges entre soignants et soignés sur la vie du groupe. Les choses se formulent comme si l’idée d’un projet pourrait annuler une autre idée, qui elle, serait plus près de la vérité du patient et salvatrice pour lui. Le clivage entre ces forces qui s’opposent prennent volontiers appui sur des différences de statut et fonctions et nous
éloignent d’une analyse possible des effets de la vie psychique des patients répercutés sur l’équipe, ou le collectif dans sa diversité. Le clivage (nous utilisons autant ce terme que celui de division) prend alors la forme de représentations qui s’opposent : 
  • de bon ou de mauvais soignant, (celui qui autorise ou celui qui refuse) ;
  • de tâche noble ou moins noble (comme changer la protection d’un patient ou participer à un entretien médical) ;
  • d’une mission prioritaire sur une autre (comme faire une visite à domicile ou coanimer un atelier pâtisserie), etc.

Ainsi, Mr B soulève la question de la part entre sa prise en charge individuelle (centrée sur un projet de vie) et la représentation d’un soin collectif, notamment sur des temps d’activité en atelier. Ce patient, dont l’état clinique reste assez flou, se livre peu, il est dans l’unité depuis plusieurs semaines lorsqu’on lui propose d’intégrer un atelier qui dispose de multiples supports de bricolage où il peut créer des objets assez librement. Il est enthousiaste à l’idée de faire de la vannerie, qui semble tirer le fil de quelque chose dans son histoire. Le jour où il doit se rendre à l’atelier, il refuse cependant d’y aller. Sur insistance de l’infirmière qui cherche à lui rappeler son enthousiasme, il demande à être accompagné, et finit par s’y rendre après qu’elle eut appelé son collègue ergothérapeute du lieu de l’atelier, pour lui signifier qu’il y est attendu. Dans nos discussions d’équipe, quelque chose s’interroge autour de la possibilité pour cet homme à faire ce déplacement, il nous apprend que ce simple trajet est pour lui dans la menace constante d’agression, qu’il risque de se faire attaquer, tel peut-être son fonctionnement psychique lorsqu’il veut lier une pensée à une autre. L’invention d’un dispositif singulier pour l’accompagner sur ce trajet pourrait ainsi tout autant nous permettre de le connaître que les d’entretiens individuels, et fait apparaître l’articulation clinique entre l’accompagnement individuel et collectif. 

À partir de ces désaccords d’équipe, apparaît la question de comment un groupe se laisse façonner par des mécanismes qui individuellement nous traversent tous à divers titres ? Comment mettre au travail les effets que nous ressentons de divisions et clivages, refoulements ou déni de cette parole que nous voulons pourtant faire circuler, pour maintenir de la vie dans des espaces pouvant devenir mortifères. Dans nos débats ou conflits, notre propre division se fait sentir, nous faisant pencher d’un côté ou de l’autre, de la posture de certitude à celle du doute. Du « ça va de soi » au « ça ne va pas de soi »… Mr P nous rappelle comment les signifiants dans leur circulation, échappent pour faire retour
là où on les attend le moins : Ne l’ayant pas vu depuis plusieurs mois, je le salue lorsque je le croise dans l’unité, où il vient passer, dit-il, quelques jours. Lorsque dans la conversation en parlant de l’unité, je lui dis qu’« ici, ça va, ça vient », parlant du passage des personnes qui commencent ou achèvent leur séjour, je vois son visage s’assombrir et il finit par dire qu’il a sa pudeur et qu’il ne souhaite pas parler de ce qui se passe « en dessous de la ceinture ».. Voilà comment cette expression « ça va ça vient », qui pour moi sonne du côté de la circulation avec sa « liberté d’aller et venir », prend pour lui un tout autre sens. Il me semble qu’il y a là le rappel, la matière à travailler sur ce qui traverse un collectif et qui échappe à la maîtrise de nos intentions. La circulation, des personnes, des objets et donc de la parole, devient le révélateur de la nature officielle et officieuse des circuits qui nous permettent de fonctionner ensemble dans ce système d’une grande ampleur et complexité qu’est l’hôpital. Les patients, spectateurs souvent discrets et attentifs de « nos moindres faits et gestes », saisissent avec une finesse qui régulièrement nous étonne, les subtilités et particularités de nos « modes de communication » et tout ce qu’il y a de personnel qui s’y rattache. Ils naviguent entre ces possibles rencontres, les alliant aux expériences qui échappent parfois au regard des soignants. Dans les ratages de leurs trajets, dans leurs projets avortés ou « mis en échec », quelque chose apparaît comme une recherche de la vérité du sujet, de ce qui fait énigme pour lui-même.

Nous sommes là, quelques soignants, des patients, leurs amis ou des membres de leurs familles, à jalonner des trajectoires qui cherchent à mettre du sens, à trouver la bonne direction, celle qui convient. Pour certains patients cette direction est parfois dans le tout vouloir, un appartement seul, « besoin de personne », mais l’évidence des conséquences de l’apragmatisme ont raison de nos désirs les plus fous à les suivre dans leurs utopies. Pour autant, d’y avoir cru avec cette personne, de l’avoir envisagé, d’avoir mené des disputes avec ses collègues pour leur faire entendre que c’est peut être une piste, que ce projet n’est pas si fou que ça, aura peut-être laissé la part nécessaire d’espoir pour lui permettre de continuer de vivre. Quelque chose de cette circulation là possible se révèle avec l’ouverture de cette porte, elle se loge dans la fragilité d’une situation qui repose sur des acteurs en constant mouvement, qui sont là certains pour guider le trajet d’une personne, d’autres pour suivre et la relever si elle tombe : Au-delà des contradictions, il s’agit de participer à un effort collectif qui cherche à maintenir la part d’humanité de la folie malgré ce que l’on connaît parfois de ses parts les plus sombres.

6. Conflits

Lecture par S. Le Lay, IDE

Aujourd’hui, nous souhaitons témoigner toutes les trois de ce que nous traversons actuellement, en tant qu’infirmière travaillant au sein de cette unité d’admission. Bien qu'aujourd’hui l’ouverture de la porte semble intégré favorablement par tous ou en tout cas n’est pas remise en question en tant que tel ; toutefois il semblerait que cela ai eu un impact sur le rôle propre de l’infirmier sur son rapport à l’autre, tant à l’équipe en son sein, qu’auprès de l’équipe pluridisciplinaire. Cela s’explique notamment par le fait qu’en ouvrant les portes, nous n’avons pas fait qu’ouvrir une porte mais cela a favorisé l’émergence de questionnements autour du sens du soin, ce dont on a tenté de vous témoigner jusqu’à présent. En ouvrant cette porte, nous n’avions pas mesuré l’impact que cela pourrait avoir sur la dynamique de l’équipe infirmière. Aujourd’hui nous sommes dans une période que l’on pourrait nommer : « période de transition » où chacun confronte ses points de vue en tentant d’entendre, de comprendre, d’intégrer, le point de vue des autres, dans la recherche d’un consensus sur lequel chacun pourrait s’adosser. Quand on a ouvert les portes, on est aussi parti du postulat, qu’on vous a expliqué un peu plus tôt, « tout est autorisé sauf exception ». Cela nécessite donc une observation, une évaluation et une prise de décision. Cette prise de décision revient souvent au médecin mais dans les faits, les infirmiers sont les premiers concernés par cette évaluation et ce positionnement. Cela peut être difficile, il n’y a pas/plus de « protocole » avec des « règles » qui nous disent comment faire, et donc ce positionnement est aussi soumis à la subjectivité de chaque soignant (cela tient compte de son histoire, son expérience, son investissement, sa disponibilité du moment, et ses propres limites…)

Concrètement, si un patient névrosé demande son lecteur de DVD dans sa chambre, quelle réponse veut-il obtenir du soignant ? Cherche-t-il à induire quelque chose chez l’autre ? Dans la forme de la demande : Veut-il se montrer résistant aux protocoles « qui ne vont pas de soi à l’hôpital » et créer une confrontation vivante ? Veut-il évaluer le champ des possibles et les exploiter de fond en combles ? Dans le fond de la demande : est-ce une manière de se replier, fuir le collectif ? est-ce un moyen concret d’inviter d’autres patients à partager un film avec lui et fuir les soignants (ou pas) ? Est-ce un support de médiation avec les soignants de parler d’un film visionné ? Est-ce un objet concret de son quotidien utilisé comme objet transitionnel ? Est-ce tout cela à la fois ou dans des étapes différentes de son hospitalisation ? Que faisons-nous de toutes ces réponses que l’on pourrait donner à un même patient, en tentant de répondre à la même demande ?

Concrètement, l’infirmier évalue et prend une décision, sur un instant T, sur ce qu’il voit du patient à ce moment là,sur ses ressentis à ce même instant T. Probablement qu’une prise de décision à un moment aurait été différente a un autre moment, avec un autre soignant… Vous imaginez bien alors que cela est source de multiples questionnements, débats et même conflits…… Il nous semble aujourd’hui, dans un processus inconscient, qu’en 1 an et demi, un glissement, à tort, semble s’être opéré. On est passé du « tout est interdit sauf exception » à « tout est autorisé sauf exception » puis « tout est permis au nom du droit du patient »… Les points positifs sont toutefois nombreux : la relation de confiance avec les patients semble davantage préservée, les situations de tension en lien avec des angoisses d’enfermement, ressenties par certains patients, semblent être plus rares… Les infirmiers n’ont plus l’impression d’être « des portiers », de « surveiller » constamment les entrées/sorties… la sonnette ne retentit plus toute la journée, ce qui, à notre sens « apaise » l’unité. Nous sommes aussi davantage en lien avec les patients puisque dans la mesure du possible, nous sommes attentifs à savoir où ils sont (en activité ? dans leur chambre ? dans le parc ?). Par ailleurs, il faut sans cesse penser à comment les inviter à investir les espaces collectifs du service, pour ne pas avoir l’impression qu’ils nous échappent, où qu’ils soient dans la fuite de la vie du service, car comme beaucoup peuvent nous dire, « à l’hôpital psy, on s’ennuie, y a rien à faire… ».

Au-delà de ça, l’unité du pôle centre est la seule unité d’admission ouverte du CHS, donc observée de loin par nos collègues, avec tout ce que cela implique : questionnements, jugement, parfois curiosité et intérêt, de la peur aussi… 

7. Un dernier mot

D. Reyboz, psychiatre

« Qu’est-ce qui va retenir les gens dans l’unité si la porte est ouverte ?" Pour moi, cette question équivaut presque à : « Qu’est-ce qui fait soin dans l’espace géographique/topologique « unité d’admission ? »

L’ouverture de la porte a pour conséquence de nous mettre face à cette terrible question. Terrible, car elle vient toucher à la base de notre travail quotidien, usuel, banal : en quoi une hospitalisation à temps complet peut-elle prétendre être thérapeutique ?

Il y a la mise à l’écart du patient de la « société civile », et la surveillance, qui protège et rassure. Il y a le gîte et le couvert, d’une qualité et d’un confort certain, qui fait certainement du bien. Il y a le marquage d’une rythmicité des temps : réveil, hygiène, repas, coucher, qui participent sûrement à une (re)structuration du temps et du corps. Il y a les entretiens individuels, pour tenter de dire quelque chose, mais eux ne sont pas liés au caractère “complet” de l’hospitalisation et pourraient être réalisés en ambulatoire. Quid de ce qui se passe pour le patient entre ces temps là ?

S’agit-il de temps morts ? De temps dont le patient tire profit pour souffler, comme dans une sorte de retraite méditative ? Se balader dans une unité me donne plutôt l’impression qu’il s’agit de temps tantôt d’ennui, tantôt de commerce, d’interactions entre patients (amicales, tendues, etc.), tantôt d’activités d’allure occupationelle menées par des soignants, tout cela pas très valorisé sur le plan psychothérapeutique.

Pourtant, il me semble, il s’y joue des choses, bien des choses. Des choses auxquelles en tant que médecin psychiatre, j’ai peu accès, pris par des entretiens individuels, la rédaction de certificats, la participation à des instances de l’établissement… j’en oublie, qui m’éloignent de la vie quotidienne de l’unité, et m’évitent les rencontres inopinées.

Les infirmiers et aide-soignants me semblent plus proches de cette vie là. (mais l’herbe est toujours plus verte ailleurs) Comment considère-t-on tout ce qu’y s’y passe ? Qu’en fait ont ? Il y a là je pense quelque chose de sous-exploité, dont la valeur est déniée : les interactions “simplement” humaines, entre ceux qui vivent là à un moment donné. Le “là”, est central. C’est où, “là” ? N’importe quelle interaction n’a pas lieux n’importe où ! Qu’il y ait interaction, c’est-à-dire quelque part rencontre, c’est déjà quelque chose. Pour qu’il y ait rencontre, il faut qu’il y ait Sujet ; tout du moins une partie suffisante pour se tenir et exister devant l’autre, même un bref instant. C’est peut être une des choses que l’ouverture de la porte nous fait craindre : les patients risquent d’aller voir ailleurs s’ils y sont ! D’autres espaces pourraient-ils être plus intéressants ? Qu’auraient-ils de différents ? Qu’est-ce qui pourrait se passer là-bas, et pas ici ? Et pourquoi ? Si favoriser la circulation, entre des lieux différenciés, peut permettre une émergence du sujet, sommes nous prêts à accepter que cela a lieu ailleurs ?

Gauchet M. & Swain G. (1980).  La pratique de l’esprit humain : L’institution asilaire et la révolution démocratique. Paris : Gallimard.
Jensen P. (2015). La vérité scientifique et le saut du tigre, In Le Monde Diplomatique, Décembre.
Lordon F. (2010). Capitalisme, désir et servitude: Marx et Spinoza. Paris: La Fabrique.